10 novembre 1887 : Elisa Leonida, une femme engagée


Découvrons aujourd'hui la vie d'une femme aussi remarquable que méconnue de par nos contrées et pourtant précurseur dans le monde en général… et celui de l'industrie en particulier.

Une femme de tête…

Elisa Leonida – c'est son nom - voit le jour ce 10 novembre 1887 à Galați, en Roumanie, au sein d'une famille nombreuse puisqu'elle n'aura pas moins de dix frères et sœurs, lesquels figureront parmi l'élite de l'ingénierie, de la sculpture, du cinéma et de la médecine du pays. On doit notamment à l'un d'eux, Gheorghe, la réalisation de la tête de la statue du Christ Rédempteur à Rio de Janeiro.

Or s'il est une autre tête bien faite, c'est assurément celle de sa sœur. Alors que son grand-père ingénieur lui a inculqué le goût des sciences, elle obtient brillamment son baccalauréat et se destine à l'École nationale des ponts et chaussées… avant de voir sa candidature refusée au motif qu'elle est une femme. Qu'à cela ne tienne. Loin de se décourager, elle postule et est acceptée en 1909 à l'École technique royale de Charlottenbourg, actuelle Université technique de Berlin. Non sans avoir été préalablement informée par le doyen que les dames ont d'autres vocations… En guise de coup de balai, elle contribue effectivement fortement à dépoussiérer le monde universitaire de l'époque en y obtenant son diplôme en 1912, devenant ainsi l'une des premières femmes ingénieures diplômées en Europe et la première dans son pays.

Après avoir décliné une offre d'emploi chez BASF, elle décroche un poste d’assistante à l’Institut Géologique de Roumanie où elle finira par prendre, quelques années plus tard, la direction de 12 laboratoires. Elle alterne alors sa vie entre l'enseignement de la physique et de la chimie et la recherche sur les ressources minérales de son pays, découvrant au passage de nouvelles techniques d’analyse.

… doublée d'une militante pacifiste et d'une mère de famille

Mais la vie d'Elisa Leonida ne se limite pas à ce parcours professionnel exemplaire qui fera d'elle la première femme acceptée dans l'Association générale des ingénieurs de Roumanie avant de rejoindre l’International Association of University Women. Loin de là ! Elle est en effet considérée comme une figure majeure du militantisme pacifiste. Ainsi, à peine a-t-elle entamé sa carrière que débute la Première Guerre mondiale. Au lieu de se terrer dans son laboratoire, elle s'engage au sein de la Croix-Rouge comme gestionnaire d'hôpitaux en Moldavie, portant notamment secours aux 22 000 blessés de la bataille de Mărășești à l’été 1917, action qui lui vaudra d'être récompensée de la médaille d’honneur par le ministère français en Roumanie. A la sortie de la guerre, elle devient présidente du comité de la paix de son institut et participe à plusieurs congrès internationaux.

Autant d'engagements qui ne la détournent pas de sa vie de famille puisqu'en 1918, elle épouse l'ingénieur Constantin Zamfirescu avec qui elle aura deux filles, l'une d'elles suivant ses traces en devenant ingénieure à son tour.

Lorsque la mort finit par l'emporter à 86 ans, le 25 novembre 1973 à Bucarest, Elisa Leonida Zamfirescu a ouvert la voie aux futures ingénieures en Roumanie et dans le monde. Un combat de haute lutte malheureusement encore loin d'être gagné puisqu'aujourd’hui encore, seuls 35% des ingénieurs actifs dans ce pays sont des femmes. Un chiffre relativement élevé au regard de la France, où elles ne représentent que 21% des ingénieurs en poste, selon une infographie de Digischool.fr…

 

Le féminin de "directeur" est "la femme du directeur" – Pierre Desproges