Un parcours exemplaire au service de la technologie


Christian Picollet est fait de ces bois qui deviennent rarissimes de nos jours. De ceux à partir desquels se bâtit l’intégralité d’une carrière au sein d’un même groupe et au service d’une seule passion : la technologie. Pour autant, son itinéraire, aussi méritant que prestigieux, est loin de constituer un long fleuve tranquille tant il marque par sa diversité…

Son cursus clunisien achevé, le néo-Gadz’arts intègre CentraleSupélec et se retrouve ainsi en 1984 avec un double diplôme d’ingénieur… et un emploi en poche. Dès sa sortie des Arts, il avait en effet été détecté par l’un des plus prestigieux groupes industriels français de l’époque : Sagem. Lequel fusionnera en 2005 avec Snecma pour donner naissance à Safran.

Il y entre officiellement le 2 juillet 1985 et débute sa carrière dans la défense navale en tant que chef de projet sur les périscopes pour sous-marins nucléaires lanceurs d’engins avec la classe Le Triomphant. Il travaille à cette occasion sur un périscope à recalage astral permettant à l’appareil de se situer rapidement lorsqu’il émerge de l’eau. En 1991, il s’oriente vers les systèmes optroniques de surface puis la navigation inertielle des missiles. En 1997, il prend la direction de l’unité de recherche et développement navigation avant d’amorcer un nouveau tournant en 1999 lorsque Sagem rachète SFIM Industrie, spécialisée dans la fabrication de matériel optique et optronique de haute précision pour l’aéronautique civile. Il fait alors partie de l’équipe chargée de son intégration dans le groupe.

Fort de ce succès, il est nommé en 2001 directeur du centre R&D d’Eragny au périmètre particulièrement vaste puisqu’il coiffe à la fois la navigation inertielle, la préparation des missions des avions d’armes, le tout nouveau programme d’armement air-sol modulaire, les drones, ou encore la sécurité morphologique, comme les empreintes digitales. Il s’y retrouve à la tête de pas moins de 1 500 collaborateurs.

En 2005, à la création du groupe Safran, il prend le poste de directeur des opérations et des programmes de la division Navigation et Défense où il s’occupe également, en dehors de ces deux secteurs, de tout ce qui touche à l’aéronautique. Il devient ensuite successivement directeur des programmes puis directeur industriel et directeur technique de Safran Electronics & Defense, jusqu’en 2011 où il choisit de créer le centre de recherche du groupe à Paris-Saclay. C’est donc en toute logique qu’en 2015, il est le tout nouveau directeur des programmes et de la stratégie R&T (recherche et technologie) de Safran. Un travail qu’il définit comme « basé sur trois piliers : la définition de la stratégie technologique du groupe, les relations institutionnelles inhérentes et la structuration et coordination des programmes de recherche de toutes ses sociétés ».

L’homme est aussi passionné qu’infatigable. En plus de ses fonctions actuelles, il occupe ainsi le poste de co-chairman du comité technique du programme européen Clean Aviation qui, fort de ses 1,7 milliard d’euros de subventions, est chargé d’imaginer l’aéronautique de demain. Il est également membre du conseil de la recherche projets scientifiques de l’Ecole des Mines de Paris et Président de l’IRT Saint-Exupéry de Toulouse.

Plus de quatre décennies après sa sortie de l’école, il n’en demeure pas moins profondément attaché aux Arts, au point d’avoir été vice-président formation industrie de la société dans les années 90. Il avoue ainsi volontiers que sa formation, basée sur la technique qui le passionne tant et couplée à celle reçue à CentraleSupélec, plus centrée sur l’automatique et l’électronique, a constitué un socle idéal pour asseoir sa carrière dans des secteurs aussi hautement technologiques que l’aéronautique et la défense. « Mon parcours actuel se situe plus au niveau de la recherche et de la technologie qu’à celui des programmes, explique-t-il : j’ai pris l’option d’une vision à plus long terme en m’intéressant à des produits et des technologies qui n’émergeront qu’à partir de 2035 et toucheront tous les domaines centraux notamment pour le grand défi actuel que constitue la décarbonation :électronique, énergie, matériaux... Autant de sujets, modèles, outils et méthodes purement techniques qui s’apprennent aux Arts, dont la formation se double d’une approche très pragmatique qui m’a été des plus utiles ». L’occasion pour lui de constater et de déplorer au passage « le dilemme auquel se heurtent nombre d’écoles d’ingénieurs qui veulent de plus en plus former des managers au détriment de la technique. Travers auquel échappent, à mon sens, les Arts & Métiers ».

Au milieu de cet emploi du temps des plus remplis, cet amateur de sport, fervent adepte de course à pied et de ski – un incontournable pour le savoyard qu’il est ! -, trouve le moyen de s’adonner à sa passion pour la lecture, et notamment Milan Kundera. Ce fidèle parmi les fidèles à son école et à son groupe prouve ainsi, par la même occasion, qu’il est parfois bon d’échapper à l’amusante densité de la technologie pour L’insoutenable légèreté de l’être…

CHRISTIAN PICOLLET (Cl. 179)

1985

Chef de projet périscopes pour sous-marins nucléaires chez Sagem.

1991

Chef de projet systèmes optroniques de surface.

1997

Directeur de l’unité de recherche et développement navigation.

2001

Directeur du centre R&D d’Eragny.

2005

Directeur des opérations et des programmes de la division Navigation et Défense de Safran.

2012

Crée le centre de recherche du groupe.

2016

Senior Vice-President R&T Strategy & Programs.

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